Entretien avec Glenn Mifflin, Cuso International

Entretien avec Glenn Mifflin, Cuso International

Photo: Glenn Mifflin, PDG de Cuso International avec Eyibio Magdalene Effiom, une bénéficiaire de la chaîne de valeur du manioc d’Odukpani, région d’administration locale de l’État de Cross River.

Initialement fondé en 1961 par un groupe de jeunes diplômés universitaires, Cuso International est dès lors devenu un organisme de coordination des bénévoles reconnu. En regardant vers l’avenir, y a-t-il des initiatives inspirantes, innovantes ou passionnantes que Cuso International aimerait partager avec nos lecteurs ?

Dans son livre The Land of Lost Content, A History of Cuso, Ian Smillie raconte que Cuso est né en 1961 de l’idéalisme de Canadiens tourné vers l’international et de la nécessité de coordonner les initiatives pionnières des groupes de bénévoles. L’organisation a connu des débuts modestes, avec de grandes aspirations portées par des Canadiens qui croyaient pouvoir changer le monde. 58 ans plus tard, Cuso International est aujourd’hui une organisation de développement international bien établie qui travaille actuellement dans 20 pays, y compris les groupes autochtones au Canada.

Bien que le placement de bénévoles fasse partie de notre héritage, de notre ADN, nous sommes bien plus qu’une organisation de volontaires pour le développement (V4D), nous travaillons différemment aujourd’hui, en partie parce que le monde a changé, que les exigences de nos partenaires ont aussi changé, ainsi que celles des donateurs et des bailleurs de fonds, mais aussi et en partie parce que les opportunités et besoins ne sont plus les mêmes qu’avant.

Parmi nos uniques caractéristiques, Cuso International est véritablement un organisme de développement canadien qui a acquis de solides références dans les domaines de l’égalité des genres et de l’autonomisation des femmes et des filles; de la santé et nutrition de la mère et du nouveau-né; et de l’autonomisation économique des jeunes. En plus d’avoir placé plus de 2 000 bénévoles canadiens au cours des cinq dernières années, nous avons aussi travaillé avec des femmes et des hommes pauvres et marginalisés provenant des régions en conflit de Colombie pour pour la création d’emplois durables. Nous avons également aidé des jeunes entrepreneurs à fonder des entreprises au Nigeria, soutenant ainsi leur indépendance économique. Nous avons aussi soutenu et renforcé des PMEs principalement dirigées par des femmes en Tanzanie, et nous avons

Obtenu de meilleurs résultats de santé pour les mères et les enfants par la formation en sages-femmes.

Nos projets incluent des fonds d’innovation qui permettent aux partenaires locaux de créer et de mettre en œuvre de nouveaux modèles de développement pour les communautés locales, plus particulièrement au profit des femmes et des jeunes. Et, dans le cadre du programme VOICE actuel, nous avons engagé plus de 600 e-volontaires dans 17 pays en février.

Glenn, vous avez d’abord rejoint Cuso International en tant que membre du conseil d’administration et maintenant en tant que PDG, bien que votre expérience professionnelle soit du secteur privé. Qu’est-ce qui vous a motivé à assumer des rôles de leadership dans le secteur du développement international ?

Oui, je me suis effectivement bâti une carrière solide dans le secteur privé avant de rejoindre Cuso International, d’abord en tant que comptable agréé chez Clarkson Gordon (aujourd’hui Ernst Young), pendant plus d’une décennie, et dans une entreprise du secteur intermédiaire de l’énergie pour 25 années supplémentaires. Mon épouse et moi avons toutefois une longue histoire de service bénévole, et j’ai donc été très heureux lorsque l’occasion s’est présentée de siéger au conseil d’administration de Cuso International. Il s’agissait d’une véritable occasion de m’impliquer au sein d’une organisation qui apporte une différence réelle et durable dans la vie d’un si grand nombre de personnes partout dans le monde. Une opportunité fondée sur des résultats concrets et durables.

Vous comprenez donc qu’au départ mes responsabilités premières au sein du conseil d’administration étaient liées au Comité des finances et de la vérification du conseil d’administration. Cette affectation m’a donné un bon aperçu des détails financiers des programmes de l’organisation et des résultats extraordinaires que ces mêmes programmes produisent. Lorsque le poste de PDG est devenu vacant, l’opportunité, de pouvoir continuer à faire une différence, était à mes yeux très importante.

Cuso International a connu des hauts et des bas comme beaucoup d’organisations de développement international au Canada. Quels mots de sagesse pourriez-vous partager avec d’autres organisations et leaders du secteur qui traversent une période difficile ?

Je n’aurai pas la prétention d’offrir des mots de sagesse à d’autres leaders ou à d’autres organisations du secteur. J’ai par contre plus largement bénéficié des compétences, des aptitudes et de l’attention que j’ai reçu du secteur que je n’en ai apporté.

Je n’ai pas fait partie de la grande histoire des contributions que Cuso International a apportées dans le monde entier. Je peux cependant dire que je suis fier de faire partie de cette histoire – une histoire qui peut se vanter de compter plus de 16 000 placements dans plus de 100 pays. Au cours mes rencontres et de mes discussions avec nos bénévoles de retour au pays et avec plusieurs de nos amis et bénéficiaires, je peux vous dire que la description la plus courante de leur expérience est qu’elle est véritablement transformationnelle.

Je dirai également que le secteur bénéficie grandement de l’appui du gouvernement canadien.  Nous devons rappeler à nos élus l’importance de notre travail, l’engagement du Canada envers le développement international et que la différence que nous faisons dans le monde est un reflet important de nos valeurs canadiennes.

Glenn, y a-t-il une seule devise ou une seule phrase qui guide votre travail chez Cuso International?

Des compétences à partager, un avenir à construire

Cuso International est un membre apprécié du CCCI. Pourriez-vous nous dire pourquoi Cuso a choisi de faire partie de cette dynamique communauté de membres ?

La possibilité de rester en contact avec notre secteur par l’entremise du CCCI appuie notre mission. Nous sommes plus forts et plus efficaces lorsque nous travaillons avec des organisations aux vues similaires pour soutenir le bien commun.

Entretien avec Ida Kaastra-Mutoigo, World Renew

Entretien avec Ida Kaastra-Mutoigo, World Renew

Entretien avec Ida Kaastra-Mutoigo, World Renew

 

Ida Kaastra-Mutoigo est la directrice-générale de World Renew.

CCCI : World Renew mène des initiatives fructueuses depuis 1962 – c’est près de 60 ans d’expérience. Selon vous, quelle est la plus grande réussite de votre organisation, et comment les autres acteurs canadiens du développement international pourraient-ils s’en inspirer?

Ida Kaastra-Mutoigo : Si je compare notre travail à celui d’autres organismes de développement international, je dirais que nous avons une expertise particulière dans le développement des capacités de nos partenaires locaux, en particulier leurs capacités à aider leurs communautés grâce à des programmes bien ficelés en matière de secours aux sinistrés, d’agriculture, de sécurité alimentaire, de santé de la mère, du nouveau-né et de l’enfant, d’épargne et d’emprunt pour les villages, de consolidation de la paix et d’égalité des sexes. Nous utilisons un modèle de partenariat depuis les années 1970.

Nous avons également mis sur pied un programme mondial de bénévolat et de partenariat efficace, qui met en relation des bénévoles, des groupes de bénévoles et des églises avec nos partenaires et leurs communautés dans les pays du Sud. L’an dernier, conjointement avec notre bureau aux États-Unis, nous avons envoyé 468 bénévoles à l’étranger, en avons mobilisé 3 268 qui ont accompli 279 000 heures de travail, et avons établi des partenariats entre 256 églises d’Amérique du Nord et des communautés du Sud – des chiffres plus qu’impressionnants pour une organisation de notre taille.

CCCI : En décembre 2018, World Renew a publié un billet de blogue intitulé « Where Partnership Transcends Religious Divides » (Des partenariats qui transcendent les différences religieuses). Cet article parle d’un partenariat de World Renew dans le cadre duquel sont offerts, au Sénégal, des programmes scolaires pour les enfants tant chrétiens que musulmans. Quels sont à votre avis les avantages et les désavantages d’être une organisation religieuse œuvrant dans le secteur canadien du développement international?

Ida Kaastra-Mutoigo : Le plus gros avantage d’être une organisation religieuse, c’est que cela nous amène à être plus sensibles à la foi et aux valeurs des gens ainsi qu’à leur vision du monde, et à mieux en tenir compte dans nos programmes, dans une perspective de changement et de développement. En fait, nous trouvons cela très facile et efficace de travailler dans des milieux multiconfessionnels qui favorisent l’inclusion de personnes de toutes religions dans le travail de développement communautaire et d’aide humanitaire. Par ailleurs, en collaborant principalement avec des groupes religieux bien intégrés à leurs communautés du Sud, nous savons que les programmes que nous mettons en place pourront continuer de fonctionner même après la fin de notre participation.

Dans toutes les cultures, traditions et religions, il existe des croyances ou des points de vue qui nuisent à l’épanouissement des personnes. Si on ne s’occupe pas de ces mentalités qui constituent des obstacles fondamentaux, même les meilleurs programmes ne pourront atteindre leur plein potentiel – s’ils n’échouent pas complètement –, que ce soit dans le domaine de l’aide humanitaire, de la santé, de l’agriculture, de la sécurité alimentaire, de la technologie ou du développement économique. Dans ma vie et mon travail dans les pays du Sud, j’ai vu à de nombreuses reprises l’influence (positive ou négative) que peuvent avoir sur les efforts de développement les opinions concernant les rôles des hommes et des femmes, les préjugés au sujet d’autres groupes ethniques et les perceptions qu’ont les gens de leur propre capacité à combattre l’injustice et la pauvreté.

Quant au plus gros désavantage, c’est que le public et les donateurs, surtout institutionnels, ne comprennent pas toujours notre raison d’être et nos motivations. On sent parfois un certain scepticisme à l’égard des organisations religieuses; leurs programmes semblent être considérés, à tort, comme plus exclusifs ou contraignants que ceux des autres organisations. Certains pensent aussi qu’elles ont de moins bons programmes ou une moins bonne gestion, ce qui n’est pas le cas. C’est vraiment dommage, car les donateurs font alors preuve de discrimination au moment de décider à qui ils octroieront des fonds, et nous perdons de formidables occasions de changer les choses. Heureusement, il y a des évaluations indépendantes qui informent le public et qui démontrent que les organisations religieuses œuvrant dans le développement international sont tout aussi efficaces, sinon plus, que les autres. J’aimerais mentionner, entre autres, un article récent de MoneySense, qui inclut au moins trois organisations religieuses, dont World Renew, dans la liste des 10 meilleurs organismes de bienfaisance internationaux en 2019. (Voir https://www.moneysense.ca/save/financial-planning/canadas-top-rated-charities-2019-best-by-category/.)

CCCI : En 2012, le nom World Renew a remplacé l’ancien nom de l’organisation, Christian Reformed World Relief Committee (CRWRC). Pouvez-vous nous parler d’une chose que World Renew travaille à améliorer, et nous dire comment vous pensez que cela vous aidera à accomplir votre mandat?

Ida Kaastra-Mutoigo : Nous cherchons, entre autres, à améliorer notre marketing et notre financement. Une des raisons derrière ce changement de nom, c’est qu’une proportion croissante de nos dons – souvent au moins la moitié de notre budget – provient de sources sans lien avec notre groupe confessionnel. Nous avons donc commencé à consacrer plus d’efforts et de ressources humaines à cet aspect de notre travail. Quand les donateurs voient ce que nous faisons plus en détail, ils nous complimentent souvent sur la grande qualité de nos programmes et notre façon de travailler avec nos partenaires locaux, et nous disent que ces choses ne sont pas bien connues des donateurs potentiels. Donc ce que nous essayons de faire, c’est d’apprendre à mieux raconter notre histoire, tout en continuant d’améliorer notre capacité à changer l’histoire des communautés que nous aidons et en maintenant notre réputation à cet égard. Nous sommes également en bonne voie d’obtenir notre certification CHS (Norme humanitaire fondamentale).

CCCI : Ida, voilà plusieurs années que vous travaillez à World Renew, dont vous êtes maintenant la directrice au Canada. En tant que femme occupant un poste de direction dans notre secteur, quels conseils donneriez-vous à des jeunes de la relève qui aspirent à suivre vos traces?

Ida Kaastra-Mutoigo : En gros, je leur dirais d’aller là où se trouve l’énergie. Pour exercer son leadership, il faut d’abord savoir gérer sa propre énergie, et ensuite trouver des façons de guider les autres afin qu’ils utilisent leur énergie pour grandir. Il ne faut jamais oublier que la seule personne qu’on peut vraiment contrôler, c’est soi-même; tout autre pouvoir est très superficiel ou temporaire. C’est uniquement par la grâce et la sagesse de Dieu que j’ai autant d’énergie et que je suis au service du développement international depuis plus de 30 ans, dont 12 comme directrice de World Renew au Canada. J’ai découvert ce qui me permet de conserver et d’augmenter mon niveau d’énergie, alors je ne perds pas mon temps avec ce qui le diminue, comme la peur. Je saisis toutes les occasions possibles de perfectionnement, je me concentre sur les priorités et les passions que j’ai déterminées grâce à la prière, et je ne présume jamais que je n’ai plus rien à améliorer. Dieu n’a pas encore dit son dernier mot, ni en ce qui me concerne, ni en ce qui concerne ceux à qui je suis liée. C’est pourquoi il est important de rendre grâce à tous ceux qui nous entourent, de toujours chercher à les comprendre et à les respecter, et de se rappeler qu’ils sont de précieux cadeaux de Dieu. Ma plus grande joie est d’encourager les gens que je côtoie, que ce soit des employés, des partenaires ou des membres des communautés, à continuer d’avancer sur le chemin qui leur fera découvrir et devenir ce pour quoi Dieu les a créés.

CCCI : World Renew est un membre estimé du CCCI. Pourriez-vous nous dire ce que votre statut de membre vous a apporté et comment vous aimeriez voir cette relation évoluer et s’améliorer?

Ida Kaastra-Mutoigo : Notre relation avec le CCCI est précieuse, car notre collaboration est axée sur l’apprentissage et la revendication auprès du gouvernement canadien. Grâce aux conversations et aux événements organisés par le CCCI, j’ai acquis une grande expertise que je peux appliquer à notre travail et à mon rôle de dirigeante. Par exemple, quand il y a eu une pression accrue pour l’intégration d’un volet de protection des enfants et des autres personnes à risque élevé dans nos programmes de développement, je me suis informée auprès des autres membres du CCCI pour savoir ce qu’ils faisaient afin de m’en inspirer. De plus, la relation du CCCI avec Affaires mondiales Canada (AMC) nous a grandement aidés à trouver des solutions aux problèmes et aux défis communs que rencontrent les organismes de développement international dans leurs partenariats ou leur utilisation des fonds d’AMC.

Quant à l’évolution ou l’amélioration de notre relation, je suggérerais au CCCI de continuer à écouter ses membres au sujet des enjeux et des occasions qu’ils considèrent comme prioritaires et d’en tenir compte au moment d’organiser des événements ou des rencontres pour renforcer la collaboration avec AMC. Jusqu’à maintenant, les sujets abordés ont été très pertinents pour le travail de développement international de World Renew, et nous sommes très reconnaissants au CCCI de chercher, d’organiser et de gérer ces occasions de collaboration, car nous n’avons pas les ressources pour le faire nous-mêmes.

Entretien avec Pascal Paradis, Avocats sans frontières

Entretien avec Pascal Paradis, Avocats sans frontières

Entretien avec Pascal Paradis, Avocats sans frontières

 

 

Ce mois-ci, le CCCI a rencontré Pascal Paradis, directeur général d’Avocats sans frontières

 

CCCI : Avocats sans frontières Canada travaille en Amérique latine, en Haïti et en Afrique actuellement. Entre autres activités, vous participez à l’observation du procès de Berta Cáceres au Honduras (leader environnementale assassinée en 2016), au sein d’une coalition d’organisations nationales et internationales. Quels sont les enjeux associés au travail dans des dossiers qui sont si politisés et conflictuels? Quelles leçons en tirez-vous?

Pascal Paradis : Notre travail nous amène de fait très souvent dans des dossiers complexes et délicats, qui sont fortement ancrés dans l’actualité sociale et politique du pays. L’État de droit, la gouvernance, les droits humains, l’accès à la justice, ce sont des notions très politiques. Toutefois, ce n’est pas sous l’angle politique que nous les abordons, c’est sous l’angle du droit. La base de toutes nos interventions, c’est le droit international et le droit national.

Notre objectif dans un dossier de litige stratégique, ou dans l’observation d’un procès emblématique comme celui des personnes accusées du meurtre de la défenseure des droits humains Berta Cáceres, c’est de nous assurer du respect des normes applicables.

Nous devons alors trouver un équilibre délicat entre le travail de développement international et celui de plaidoyer pour une plus grande justice. Une leçon importante est qu’en demeurant focalisés sur le cadre juridique, nous conservons une crédibilité et une indépendance qui sont cruciales.

CCCI : Compte tenu du fait que votre mission est de renforcer l’accès à la justice et à la représentation juridique, comment choisissez-vous vos partenaires et les cas emblématiques dans lesquels vous travaillez?

Pascal Paradis : Les partenaires sont choisis en fonction des valeurs et principes d’action d’ASFC. Les partenaires doivent aussi nous choisir sur la base de leurs valeurs! On cherche une concordance en matière d’intégrité, d’engagement, de collégialité, de complémentarité, d’affirmation des droits humains, de professionnalisme et responsabilité.

Les cas emblématiques sont presque toujours choisis par les partenaires d’abord, ASFC étant là pour répondre à des besoins de renforcement de capacités en méthodologie, application du droit international, enquête, préparation des témoins, etc.

Le litige stratégique de cas emblématiques consiste à sélectionner parmi de multiples dossiers de violations des droits humains existants celui qui aura le plus de chance d’aboutir à une condamnation, sur le fond ou sur la procédure, par un tribunal national.

Le dossier sélectionné peut également être celui le plus symbolique de par les faits poursuivis, tels que le viol, l’esclavage sexuel ou le crime contre l’humanité, ou en raison du statut social ou politique de l’auteur du crime, comme cela est le cas lors de l’ouverture de poursuites contre d’un ancien dictateur ou des plus hauts responsables étatiques. La décision rendue créera une jurisprudence sur laquelle les dossiers suivants pourront s’appuyer pour obtenir justice.

CCCI : Avocats sans frontières Canada reçoit l’appui financier pour ses programmes du Gouvernement du Québec, du Gouvernement du Canada et vous avez aussi des partenaires financiers issus d’entreprises privées, de même que le Barreau du Québec. Que pouvez-vous dire à propos de cette diversité de bailleurs de fonds et les défis que vous confrontez?

Pascal Paradis : La majeure partie de notre financement programmatique provient du gouvernement du Canada à travers une gamme variée de ses programmes de coopération internationale. C’est important pour nous de compter sur un tel partenariat qui démontre la confiance dont jouit ASFC. Nous sommes également très fiers de compter sur l’appui – y compris l’appui financier – d’une large partie de la communauté juridique, dont la plupart des grands cabinets d’avocats du pays, le Barreau, et de plusieurs entreprises privées. C’est une question de crédibilité, et aussi une illustration de l’engagement des Canadien.nes envers la mission de l’organisation. Cela nous permet aussi d’avoir accès à beaucoup de services bénévoles.

La diversité des bailleurs de fonds est extrêmement importante pour la sécurité financière de l’organisation à long terme. L’objectif est d’être à l’abri de possibles crises, du fait d’être trop dépendants d’un seul et même bailleur.

Pour cette raison, nous continuons de développer des partenariats et de maintenir des événements de financement, comme par exemple notre spectacle bénéfice annuel.

CCCI : Vous faites partie du conseil d’administration du CCCI depuis quelques mois. Quelles sont les perspectives uniques grâce à votre expérience chez ASFC que vous voulez apporter au CA du CCCI? Et que souhaitez-vous retirer de cette expérience.

Pascal Paradis : J’ai énormément de respect pour le rôle que joue le CCCI au Canada. C’est un excellent porte-parole de la communauté du développement international et de l’aide humanitaire, un créateur de synergies, un centre d’analyse et de réflexion, un forum où nous pouvons nous réunir et parler d’une voix unie aux autres parties prenantes. J’espère pouvoir y contribuer en partageant l’expérience unique d’ASFC à titre d’organisation de coopération internationale hautement spécialisée, entre autres sur le plan juridique. De mon côté, j’en retire déjà beaucoup en matière de dialogue pancanadien et de meilleures pratiques. Je trouve le CCCI très innovant dans sa réflexion sur la coopération internationale.

CCCI : Lors de la dernière conférence annuelle du CCCI à Ottawa, vous avez participé à un panel organisé par le programme Prochaine Géneration CCCI-ACÉDI à propos de la collaboration entre les académiques et les organismes de développement international. Quelles leçons tirez-vous de cette réflexion et de vos pratiques chez ASFC?

Pascal Paradis : La recherche est une partie intégrante de tous nos projets de coopération internationale, en ce que l’objectif de partage au niveau national des bonnes pratiques internationales et du droit international nécessite une constante implication d’experts internationaux et nationaux qui, ensemble, produisent des rapports, enquêtes, argumentaires, mémoires, etc. sur la base desquels des actions concrètes sont entreprises.

Nous faisons d’ailleurs partie du Partenariat canadien pour la justice internationale qui regroupe plusieurs des plus éminents juristes canadiens en matière de lutte aux crimes internationaux (crimes de guerre, crimes contre l’humanité, génocide) de même que les principales organisations de la société civile active dans ce domaine. L’idée est justement de lier la recherche à l’action sur le terrain.

Il s’agit d’un partenariat qui bénéficie tant aux groupes universitaires qu’aux organismes de développement international. Les groupes universitaires d’ASFC contribuent par leurs recherches à soutenir les droits humains et ce faisant, acquièrent une formation. Cela contribue donc à la relève générationnelle. En outre, ça permet aux futurs avocats et autres étudiants avec un intérêt marqué pour les droits humains d’approfondir leurs connaissances, développer leur propre réseau et connaitre le travail d’ASFC. ASFC bénéficie d’un accès facile à un groupe d’experts qui peuvent contribuer leurs connaissances à nos projets.

Entretien avec Kevin Frey, PDG de Right to Play

Entretien avec Kevin Frey, PDG de Right to Play

 

 

Ce mois-ci, le CCCI a rencontré Kevin Frey, président-directeur général de notre plus récent nouveaux membre, Right to Play!  

 

CCCI : Right to Play exploite la puissance du jeu afin de protéger, d’éduquer et d’aider les enfants à surmonter des réalités difficiles. Y a-t-il un projet ou un programme particulier de Right to Play qui, selon vous, devrait influencer d’autres organisations de notre secteur ? Et si oui, qu’est-ce que d’autres personnes pourraient apprendre de Right to Play ?  

Kevin Frey: L’approche unique de Right to Play par rapport à l’éducation, soit notre programme d’apprentissage sensible au genre et axé sur le jeu, est une nouvelle initiative novatrice qui contribuera à améliorer la qualité de l’éducation pour des milliers d’enfants en Afrique et au Moyen-Orient. Cette approche utilise la méthode éprouvée d’apprentissage par le jeu de Right to Play qui a transformé l’enseignement en classe et la formation des enseignants dans de nombreuses écoles. Cette méthodologie a été adaptée pour pouvoir être utilisée dans les documents du programme de formation des enseignants. Dans sa plus récente version, notre programme de formation des enseignants met désormais l’accent sur la façon dont ces méthodes d’enseignement créatives peuvent encourager les filles à devenir des leaders, s’attaquer aux obstacles à l’éducation basés sur le genre et contribuer à des salles de classe plus sûres et inclusives pour tous les élèves.    

CCCI : Quel est le plus grand obstacle auquel a fait face Right to Play au cours des années, que ce soit dans le cadre de l’un de ses programmes, au sein de l’organisation ou avec des intervenants externes (ou autres), et comment avez-vous réussi à maîtriser ou surmonter cet obstacle ?

Kevin Frey: L’un des obstacles auxquels Right to Play fait face, c’est que jouer n’a pas été généralement perçu comme une intervention importante pour les enfants en situation difficile par de nombreux intervenants clés dans les milieux du développement et de l’éducation. Toutefois, les programmes, la recherche et les évaluations de Right to Play ont démontré que jouer, et les approches fondées sur le jeu, ont un impact transformateur sur les enfants. Fondés sur des approches axées sur le jeu, les programmes de Right to Play au Pakistan ont mené à une réduction significative de la violence fondée sur le genre à la maison et dans les écoles. Les approches de soutien psychosocial axées sur le jeu de Right to Play ont contribué à accroître la résilience chez les enfants vivant dans des situations de violence et de conflits chroniques, comme en Cisjordanie et à Gaza. Right to Play continue de faire de la recherche et de recueillir des données probantes montrant le potentiel transformateur du jeu pour les enfants dans de nombreux contextes différents.

CCCI : Y a-t-il une organisation ou un individu en particulier avec qui Right to Play aimerait collaborer ? Et à quoi ressemblerait cette collaboration idéale ?  

Kevin Frey: Nous sommes intéressés à poursuivre la collaboration avec les organisations de la société civile canadienne et internationale qui travaillent avec les communautés où nous travaillons également en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie. Nous avons vu que, lorsqu’on travaille ensemble, l’impact sur nos bénéficiaires peut être beaucoup plus grand, notre voix collective est plus forte et nous réduisons les inefficacités dans le secteur. Nos collaborations idéales mettent l’emphase sur les forces individuelles de chaque partenaire. Par exemple, Right to Play apporte une méthodologie unique fondée sur le jeu qui peut être utilisée pour atteindre un ensemble de résultats de développement importants. Nous voulons que nos collaborations puissent mettre en valeur cette force unique pour amplifier le travail de nos partenaires, tout en nous permettant d’apprendre de leurs forces et de leurs approches.

CCCI : Right to Play est un membre relativement nouveau du CCCI. Qu’est-ce qui a influencé la décision de Right to Play de se joindre au CCCI, et quels ont été les bénéfices de cette adhésion pour votre organisation ?  

Kevin Frey: Right to Play a décidé de rejoindre le CCCI afin que d’être mieux relié au secteur des organismes de la société civile de développement international au Canada. Nous nous sommes rendu compte que bon nombre de nos objectifs pourraient être mieux atteints en travaillant avec d’autres organisations. Nous avons été heureux d’être en mesure d’accéder à une coalition d’organisations similaires, confrontées aux mêmes défis et possibilités dans le paysage canadien et international. Nous avons bénéficié d’être à l’affût de ce qui se passe à Ottawa et ailleurs, y compris à travers le Groupe de travail des directions financières et le Groupe de travail sur les politiques. Nous avons apprécié les possibilités offertes par le CCCI de tisser des liens avec Affaires mondiales Canada et d’autres parties prenantes. Nous avons également profité de notre adhésion au CCCI pour développer des relations plus fortes avec d’autres organisations membres.

Entretien avec Kevin Frey, PDG de Right to Play

Entrevue avec Will Postma – Le Fonds du primat pour le secours et le développement mondial

Entrevue avec Will Postma – Le Fonds du primat pour le secours et le développement mondial

Entrevue avec Will Postma – Le Fonds du primat pour le secours et le développement mondial

 

Le Fonds du primat pour le secours et le développement mondial (PWRDF) est déterminé à répondre aux besoins de développement à long terme et à travailler en partenariat avec les communautés et les organisations locales. Pourriez-vous nous parler de l’un de vos nouveaux programmes que vous trouvez des plus stimulants ? Nous savons que ça doit être difficile de choisir !

Un nouveau programme au sujet duquel nous sommes très enthousiastes est une initiative jeunesse de microfinancement avec NEDC (Nuu-chah-nulth Economic Development Corporation) en C.-B. Le programme de Stratégie d’affaires pour les jeunes autochtones donne accès à un fonds de prêts pour aider les jeunes autochtones à se lancer en affaires, avoir du succès, créer des emplois et développer de la richesse. Le financement de PWRDF appuiera le fonds de prêts ainsi que la programmation destinée à former et soutenir les jeunes dans le développement de leurs compétences en matière de marketing, de flux de trésorerie, de logistique, de finances personnelles et d’élaboration de budgets.

Partager des histoires est un excellent moyen susciter l’intérêt des Canadiens à un niveau humain. Pourriez-vous illustrer comment la bibliothèque d’histoire de PWRDF a été en mesure d’y parvenir ?

Nous avons un incroyable réseau de bénévoles à travers le pays qui partagent nos histoires avec leurs communautés et paroisses. Ils partagent des histoires du bulletin mensuel Voix de l’espoir lors des services religieux chaque semaine et ils prennent la parole dans les églises et dans de nombreux autres événements communautaires – dans les écoles, les Clubs Lions et les Clubs Rotary, avec les représentants municipaux, et même lors de fêtes d’anniversaire et de mariages ! Ils partagent des vidéos que nous avons produites et qui présentent le travail de nos partenaires. Nous sommes actifs sur les médias sociaux et nos bénévoles partagent rapidement nos histoires dans leurs réseaux, ajoutant souvent des éléments de contexte qui rendent les histoires plus percutantes pour leurs publics respectifs. Nous produisons également des prières pour le Carême et l’Avent dans lesquelles nous parlons des exigences bibliques en faveur de la justice et de la compassion dans notre travail. Les gens s’inscrivent pour recevoir ces messages leur boîte de réception tous les jours. Cette année marque le 60e anniversaire de la catastrophe minière de 1958 à Springhill en Nouvelle-Écosse – événement qui a marqué le début de PWRDF – et nous sommes en train de produire un livre virtuel qui comptera 60 histoires pour 60 ans. Le livre sera disponible sur notre site web et les histoires individuelles seront partagées dans les médias sociaux. Pour souligner cette étape importante, nous allons également publier une nouvelle vidéo qui met en vedette le travail inspirant de deux de nos bénévoles, un couple mère-fille de Camrose en Alberta.

Nous avons très hâte d’assister à votre panel, lors de la Conférence annuelle 2018 du CCCI, qui portera sur les perspectives des communautés autochtones par rapport aux objectifs de développement durable. Sans trop en dévoiler, à quoi peut-on attendre de ce panel ?

Il y a tellement de sagesse, d’impact et de collaboration au sein et entre les communautés autochtones. Il est temps de partager ces apprentissages non seulement pour améliorer notre travail visant à renforcer la réalisation des droits de la personne au Canada, mais aussi pour le bénéfice de l’ensemble de la communauté du développement international. Ensemble, nous pouvons faire des progrès dans la réalisation des ODD. Les résultats sont en train de se produire.

Entrevue avec Jim Cornelius – Directeur Général de la Banque canadienne des grains

Entrevue avec Jim Cornelius – Directeur Général de la Banque canadienne des grains

La Banque canadienne de grains (BCG) travaille en vue d’éradiquer la faim dans le monde en fournissant de la nourriture en temps de crise, en aidant les gens à cultiver des aliments pour se nourrir eux-mêmes, et en fournissant un soutien nutritionnel aux personnes souffrant de malnutrition. Éradiquer la faim dans le monde est un noble objectif.  Est-ce que la BCG a une histoire de réussite à partager en lien avec la quête qu’elle mène pour atteindre cet objectif ? 
Chaque fois qu’une famille qui souffre de la faim est en mesure d’accéder à de la nourriture en raison d’un système de protection sociale fonctionnel ou de secours alimentaires opportuns, il s’agit d’une réussite. Je me souviens d’une discussion que j’ai eue avec une veuve au Niger alors que nous regardions ses deux jeunes garçons se chamailler dans la cour. Elle mentionnait que, quelques mois plus tôt seulement, ils n’auraient pas eu l’énergie nécessaire pour se chamailler en raison de la pénurie alimentaire causée par la grave sécheresse qui avait ravagé ses cultures. La ration mensuelle que nous fournissions était suffisante pour assurer l’alimentation dont la famille avait besoin et lui permettait de ne pas être obligée de s’endetter ou de vendre sa terre pour survivre.  Ça, c’est une réussite.  Bien sûr, nous travaillons également à renforcer la résilience des communautés face à la sécheresse. De voir pousser le maïs dans les champs des petits paysans, au Kenya, qui ont adopté des pratiques d’agriculture de conservation pendant que le maïs des champs voisins ne pousse pas en raison de la sécheresse, c’est une réussite. Nous avons investi des ressources importantes dans la promotion de l’agriculture de conservation pour améliorer la santé des sols et la résilience à la sécheresse, et nous voyons de plus en plus de gens adopter ces pratiques. Quand tous les voisins auront adopté ces pratiques, là nous pourrons dire que nous avons vraiment réussi.
La BCG a joué un rôle déterminant pour mettre fin à l’aide alimentaire liée au Canada. Qu’est-ce qui a poussé la BCG à mettre de l’avant cette initiative politique et pourquoi a-t-elle été un succès ?
Les origines de la Banque Canadienne de Grains impliquent des agriculteurs canadiens partageant des grains qu’ils avaient produits. Notre identité propre était liée à l’expédition de grains canadiens. Et dans de nombreux cas, c’était très sensé.  Cependant, nous n’étions pas toujours en mesure d’offrir une aide aussi opportune que nous l’aurions souhaité. Nous avons parfois eu à échanger des grains canadiens contre d’autres produits alimentaires nécessaires ou préférés.  Il y a eu de nombreux cas où il était plus coûteux d’expédier des aliments canadiens plutôt que d’en acheter localement ou régionalement. Et nous étions inquiets de perturber les marchés locaux. Plaider pour un tel changement nécessitait d’avoir des conversations approfondies avec les agriculteurs canadiens et leurs organisations afin de leur expliquer pourquoi mettre fin à l’aide alimentaire liée était une chose tout à fait sensée et que cela ne nuirait pas aux agriculteurs canadiens. Notre soutien aux agriculteurs, qui ont à cœur les familles paysannes dans d’autres parties du monde, s’est avéré crucial pour convaincre les organisations agricoles et leurs voisins d’accepter ce changement de politique. Une fois que les principales organisations agricoles ont convenu de ne pas s’opposer au changement, le gouvernement a été en mesure d’aller de l’avant avec le changement de politique.
Qu’est-ce que les gens seraient surpris d’apprendre au sujet de la BCG ?

Ce n’est pas tout le monde qui sait que la Banque canadienne de grains est une association de 15 églises et organismes religieux canadiens.  Nous sommes un organisme à base confessionnelle avec de profondes racines dans la communauté des agriculteurs et fermiers canadiens. Toute notre programmation internationale est dispensée par nos Églises membres et leurs partenaires. Même si nous sommes mieux connus pour nos programmes d’aide alimentaire, nous sommes aussi l’un des plus gros bailleurs de fonds du Canada pour les programmes d’agriculture et de nutrition.