Conversation avec Andy Ouedraogo, agente de recherche et de programme de Coopération Canada.

Andy Ouedraogo est agente de recherche et de programme du premier projet de prospective stratégique de Coopération Canada, l’Initiative futurs de la coopération mondiale, financé par le Centre de recherches pour le développement international (CRDI). Un an après le lancement du projet, Andy retrace le chemin parcouru et présente un nouveau rapport, l’Analyse du paysage du secteur de la coopération internationale.

 

Vous vous êtes jointe à Coopération Canada à titre d’agente de recherche et de programme pour diriger notre tout premier projet de prospective stratégique financé par le Centre de recherches pour le développement international (CRDI). Un an plus tard, où en sommes-nous ?

Ce fut un véritable voyage et je suis heureuse de dire qu’un an après, nous avons franchi un certain nombre d’étapes, notamment la conclusion récente de notre phase de recherche intensive, commémorée par le lancement de l’Analyse du paysage du secteur de la coopération internationale, une analyse des tendances émergentes et des moteurs de changement dans la coopération internationale. Nous avons également fait participer près de 220 acteur-trice-s canadien-ne-s et mondiaux-ales du développement international à nos ateliers, discussions de groupe et enquêtes, dans le but de co-créer des connaissances et d’inclure autant de voix et de perspectives que possible.

 

Pouvez-vous nous dire comment vous avez réussi à naviguer dans le paysage complexe de la prospective ?

Anticiper l’avenir peut être décourageant. Diriger ce projet, c’est comme construire une voiture tout en la conduisant. Nous ne nous contentons pas de diriger et de naviguer dans le véhicule, nous installons également des composants, nous affinons le moteur et nous ajustons la conception, tout en nous déplaçant. Au cours des premiers mois, la peur de ne pas y arriver a assombri mon enthousiasme. Anticiper l’avenir ? Qui, moi ? Mais j’ai appris à ne plus me focaliser sur la précision et à adopter le processus itératif qui consiste à affiner la stratégie, à intégrer de nouvelles idées au fur et à mesure qu’elles apparaissent, à réévaluer les méthodologies et à rectifier le tir si nécessaire. L’avenir ne suit pas un scénario, et les plans changeront inévitablement. Les calendriers rigides et les approches linéaires ne sont pas les plus réactifs au changement et limiteraient la capacité à identifier les nouvelles tendances et les questions émergentes qui pourraient potentiellement être perturbatrices. La capacité d’adaptation et la collaboration avec un partenaire de prospective stratégique qui adopte des méthodologies souples et agiles ont été essentielles pour surmonter les incertitudes et maintenir notre projet sur la bonne voie. J’ajouterai également qu’une bonne prospective repose sur la diversité de l’ensemble des données, y compris les contributions d’un large éventail de parties prenantes. En faisant appel à des voix et des perspectives diverses, nous obtenons une compréhension plus complète des trajectoires futures potentielles. Un exemple de la manière dont Coopération Canada a procédé est celui de nos dialogues régionaux, organisés en partenariat avec des réseaux régionaux d’OSC dans cinq régions différentes. Ces dialogues ont permis de valider les domaines existants en fonction des nuances régionales, des défis et des aspirations futures du secteur. En outre, ils nous ont permis d’incorporer des connaissances d’observation intra-personnelles, dérivées des observations de première main des participant-e-s sur les changements locaux et de leurs perceptions de l’avenir du développement influencées par les événements et les tendances locaux et régionaux.

 

Avez-vous des leçons à partager ou des conseils à donner aux OSC qui souhaitent se lancer dans la prospective ?

La prise de conscience que l’avenir n’est pas forcément une fatalité unique a été profonde. La reconnaissance de cette pluralité a élargi ma perspective et mis en lumière la complexité des scénarios futurs plausibles ; mon premier conseil serait donc d’embrasser la pluralité de l’avenir. Ensuite, je dirais qu’il faut délimiter judicieusement le champ d’application afin de garantir la pertinence, l’actionnabilité et l’impact. Les études futures peuvent facilement vous mener dans de nombreuses directions, en particulier lorsqu’elles se penchent sur les systèmes mondiaux. On se rend vite compte à quel point le monde est interconnecté et on peut se retrouver piégé dans une toile d’araignée géante sans savoir dans quelle direction aller. En définissant des limites et des objectifs clairs, nous avons non seulement pu adapter le processus de prospective à nos besoins et à notre contexte spécifiques, mais nous avons également pu choisir les méthodologies, les approches et les outils appropriés qui conviennent le mieux à l’Initiative futurs. Mon dernier conseil serait d’opter pour une approche itérative et de privilégier le processus à la précision. Il est essentiel de laisser la place à l’apprentissage continu, à l’expérimentation et à l’amélioration pour garantir la pertinence du résultat. Le plaisir de la prospective stratégique ne réside pas seulement dans le résultat, mais aussi dans le processus. Il réside dans les rires des séances de brainstorming, dans les moments « aha » lorsqu’une tendance se dessine et dans l’excitation partagée lorsqu’un exercice de prospective suscite la créativité. Alors, adoptez le processus.

 

À quoi ressemble l’avenir pour vous ?

Eh bien, l’avenir est beaucoup plus proche que vous ne l’imaginez. Alors qu’il ne reste plus que deux ateliers, j’ai hâte de cocréer trois scénarios de transformation de la coopération internationale avec les OSC et d’autres acteur-trice-s du développement, ainsi que d’étudier et de discuter de leurs implications pour les sept à dix prochaines années. Cliquez ici pour vous inscrire à notre atelier de création de scénarios.