Après le témoignage et la démission ministérielle de Jody Wilson-Raybould, le mois de mars s’est annoncé comme un lion rugissant, faisant l’écho d’un remaniement ministériel qui a vu Marie Claude Bibeau, ancienne ministre du Développement international, se retrouver en charge de l’Agriculture.

Au cours des trois dernières années et demie, la ministre Bibeau a collaboré étroitement avec le secteur de l’aide humanitaire et du développement international canadien pour l’élaboration d’un programme ambitieux d’aide internationale canadienne. Elle annonçait, en juin 2017, le lancement de la Politique d’aide internationale féministe (PAIF), un grand pas en avant pour l’égalité des genres et une source d’inspiration pour le secteur de la coopération internationale.

A travers le monde, la preuve est faite qu’investir dans les femmes et les filles est le meilleur moyen de lutter contre la pauvreté à l’échelle internationale. Le Canada n’a d’ailleurs pas cessé de mobiliser la communauté mondiale derrière cette cause. Pourtant, les hautes ambitions d’égalité des genres ne sont pas encore pleinement réalisées au Canada, tant au niveau des politiques nationales qu’internationales.

C’est aussi dans ce contexte que la nomination de Maryam Monsef au poste de ministre du Développement international, en plus de son rôle de ministre des Femmes et de l’Égalité des genres, représente une unification formelle de deux dossiers qui ont été inextricablement liés ces dernières années. On craint, évidemment, qu’un dossier n’éclipse l’autre, ou que certaines questions soient oubliées au cours du remaniement. Bien que les deux portefeuilles aient trop souvent été relégués en marge des intérêts parlementaires, il existe néanmoins des raisons d’être optimistes car ce double mandat peut faire progresser l’égalité des genres tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières.

Le jour du remaniement ministériel, Affaires mondiales Canada publiait des indicateurs de rendement clés pour les six champs d’action du PAIF, en mettant l’accent sur l’égalité des genres et le renforcement du pouvoir des femmes et des filles, manifestant ainsi l’engagement du gouvernement à suivre ses progrès.

Quelques jours plus tard, la ministre Monsef lançait un comité consultatif national composé de 16 dirigeants engagés à promouvoir l’égalité des genres et à « améliorer la vie des femmes et des filles au Canada mais aussi dans le monde entier », dissipant ainsi le mythe selon lequel nous devons choisir entre aider les gens dans le besoin au pays et ceux partout ailleurs dans le monde. En effet, nos efforts seront plus fructueux si nous faisons les deux, comme le suggère les Objectifs de développement durable adoptés par les Nations Unies.

Lors de leur première rencontre, les membres de ce nouveau comité ont été rejoints par Katja Iverson de Women Deliver, la plus grande conférence mondiale de défense de l’égalité des genres, et de la santé, des droits et du bien-être des femmes et des filles. Cette année, la conférence aura lieu à Vancouver du 3 au 6 juin, offrant au Canada une occasion unique pour faire progresser l’égalité des genres sur la scène mondiale et ainsi attirer l’attention sur le bilan de notre pays dans ce domaine.

La semaine prochaine, le ministre des Finances, Bill Morneau, dévoilera le budget fédéral de 2019, qui comprendra une section sur l’aide au développement officielle – l’aide canadienne – précisant le pourcentage du revenu national brut du Canada que le gouvernement fédéral est prêt à contribuer pour l’éradication de l’extrême pauvreté dans le monde. Le Canada contribue actuellement jusqu’à 0,26 % de son RNB, ce qui représente un niveau presque record au Canada au cours des quatre dernières décennies et qui est bien en dessous de la moyenne des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques. C’est aussi l’occasion pour le Canada d’intervenir et de prouver que notre pays aussi est prêt à jouer son rôle sur la scène internationale.

Pourvue d’une vision définie et de valeurs claires, le verdict de cette politique ambitieuse du gouvernement dépendra donc de son exécution. Bien que le gouvernement ait déjà fait preuve de responsabilité et de transparence en publiant les objectifs qu’il s’est fixés, ce nouveau et audacieux programme de changement ne pourra être réalisé sans de nouvelles ressources tout aussi ambitieuses.

Avec la nomination de la ministre Monsef assumant dorénavant un double portefeuille, le Canada a la possibilité de rationaliser ses efforts pour faire de l’égalité des genres une réalité au Canada et partout dans le monde. Peu importe où elles naissent, les filles et les femmes doivent bénéficier des mêmes opportunités que leurs homologues masculins : à savoir l’éducation, l’emploi, l’accès aux soins de santé et au leadership au sein de leur communauté.

La ministre Monsef a maintenant un mandat de travail clairement défini, à travers lequel, en collaboration avec ses collègues du Cabinet, elle pourra s’assurer que le Canada réponde aux besoins des femmes partout dans le monde.

Nicolas Moyer est le Président-Directeur Général du Conseil canadien pour la coopération internationale